Le23avril2005 était mise en ligne lavidéo de dix-huit secondes intitulée Me at the Zoo, de Jawed Karim. Elle le montre devant l'enclos des éléphants au zoo de SanDiego (Californie). Bon, on y est, en face des éléphants. Le truc cool, avec ceux-là, c'est qu'ils ont des trompes vraiment très très longues. Et a, c'est cool. Et c'est à peu près tout ce qu'il y a àdire. Mise en scène de soi, capture d'un événement du quotidien et réflexion tout ce qu'il y a de plus personnelle, cet enregistrement préfigurait ce qu'allait devenir le service qui réunit, chaque mois, plus d'un milliard d'internautes et où, chaque minute, cent nouvelles heures de contenus sont ajoutées. Me at the Zoo est la première vidéo postée sur YouTube, dont l'existence a officiellement commencé il y a dix ans, avec le dépt du nom de domaine Youtube.com, le 14février2005. Aux commandes du projet, trois anciens salariés du système de paiement en ligne PayPal : Steve Chen, Chad Hurley et Jawed Karim. Ils travaillent dans des locaux situés au-dessus d'une pizzeria et d'un resto japonais à SanMateo, Californie. Ils veulent créer une nouvelle start-up, mais ne se lancent dans YouTube qu'après avoir abandonné leur projet précédent : un site de rencontres vidéo appelé Tunein HookUp, basé sur le même principe qu'un site de notation de photos d'internautes, Hot or not - qui inspira aussi le créateur de Facebook, Mark Zuckerberg, dans ses jeunes heures. Sur l'origine même du concept (toutes les légendes ont besoin d'un acte fondateur), les versions divergent. Comme élément déclencheur, Hurley et Chen évoquent régulièrement la difficulté de partager les vidéos prises lors d'une soirée dans l'appartement du second, à SanFrancisco. Mais Karim, qui a vite quitté l'entreprise afin de poursuivre ses études d'informatique, raconte une autre histoire. C'est lui qui aurait eu l'idée de YouTube, constatant la difficulté qu'il avait à trouver des images de deux événements marquants de2004 : le tsunami en Asie et… le sein dénudé de Janet Jackson lors du SuperBowl. Un potentiel viral viterepéré A cette époque, la vidéo existe déjà sur le Web, bien sr. Mais pour le commun des internautes, difficile de partager ses créations. Et les systèmes qui permettent de les lire dans un navigateur sont tout sauf conviviaux (on se souvient de l'ignoble player de RealMedia). YouTube va non seulement permettre la diffusion de la création vidéo personnelle, mais il va faire de ces images qui bougent un média du Web à part entière, au même titre que l'écrit ou la photo. Et c'est notamment grace à une fonctionnalité qui arrive très vite : l'embed, ou la possibilité d'intégrer une vidéo YouTube à n'importe quelle page web grace à un petit bout de code à copier-coller. Les débuts sont fulgurants. Le public découvre la plateforme en version bêta en mai2005. A peine quatre mois plus tard, en septembre, une vidéo dépasse déjà le million de vues. Il s'agit d'une publicité Nike mettant en scène Ronaldinho. YouTubene sera lancé officiellement que le15décembre2005. Plus de 8millions de vidéos sont alors regardées quotidiennement. Mais quand on permet à tous les internautes de partager n'importe quelle vidéo, les ennuis de droits ne sont jamais loin. YouTube se retrouve ainsi en première ligne quand les utilisateurs décident de poster des clips ou des séquences venues de la télévision. La première affaire d'importance arrive dès février2006, quand un sketch de l'émission Saturday Night Live intitulé Lazy Sunday, où Andy Samberg et Chris Parnell chantent un rap énervé sur leur passion pour les cupcakes et leMonde de Narnia, cartonne sur YouTube avec des millions de vues au compteur. NBC demande le retrait des vidéos de la plateforme. Mais la chane américaine peroit aussi le potentiel viral et devient, dès le mois de juin, le premier acteur audiovisuel à nouer un partenariat avec YouTube pour la diffusion de certains de ses contenus. L'acquisition de Google pour1,65milliard de dollars La vraie nouveauté, c'est que, sur YouTube, on ne regarde pas forcément ce qu'on peut déjà voir ailleurs. Un vrai contenu propre à la plateforme, bien loin des productions audiovisuelles classiques, commence à voir le jour et les premiers gros succès d'audience aussi. Ainsi, le danseur Judson Laipply met en ligne en avril2006 son Evolution of Dance, vidéo dans laquelle il explore en six minutes l'histoire des danses populaires. Il va rester longtemps en tête du classement des vidéos les plus vues et son compteur atteint aujourd'hui près de 300millions. En juin, c'est au tour de Bree, une adolescente de 16ans qui commence une série de vidéos sous le pseudonyme lonelygirl15. Elle raconte sa vie familiale et amoureuse dans de courtes vidéos postées régulièrement depuis sa chambre. Puis les monologues commencent à aborder des sujets étranges à base de secte et de cérémonies secrètes. Les internautes flairent la supercherie et les créateurs de lonelygirl15 finissent par admettre que Bree est une actrice, Jessica LeeRose, et que tout ceci n'est qu'une fiction (qui durera jusqu'en2008). Pendant l'été, débarque Leeroy Jenkins, une vidéo du jeu World of Warcraft dans laquelle un joueur part au combat en hurlant son nom au mépris de toute stratégie. Dans un tout autre style, la vidéo dégoulinante des free hugs (calins gratuits) rassemble des millions d'internautes en mal d'affection. YouTube commence à faonner la culture web. En juillet2006, ce sont 100millions de vidéos qui sont lues chaque jour sur la plateforme. Dans les mois qui suivent, trois autres partenariats importants sont signés avec CBS, Sony et Universal Music. Tout ceci devient particulièrement appétissant. C'est juste le début de la révolution de la vidéo sur Internet,déclare le patron de Google, Eric Schmidt, en octobre2006, lors du rachat de YouTube pour basket tn requin homme 1,65milliard de dollars. C'est, à l'époque, la plus grosse acquisition du géant (qui ressortira six mois plus tard son portefeuille pour acheter la plateforme de pub DoubleClick pour 3,1milliards de dollars). YouTube compte alors un peu moins de 70salariés et devient, aux ctés de Myspace et du petit Facebook, la locomotive de ce qu'on appelle le Web2.0, qui donne aux internautes les moyens de créer et de diffuser leur propre contenu. Le 25décembre2006, la couverture personne de l'année duTime représente un ordinateur qui affiche un lecteur YouTube avec, en titre, You (vous). Et en sous-titre : Oui, vous. Vous contrlez l'age de l'information. Bienvenue dans votre monde. Le centre névralgique d'une contre-culture potache Le rachat par Google permet à YouTube de lancer, en2007, des versions locales dans sept pays (dont la France) nike air rift ninja homme et de mettre en place, au mois d'octobre, le très attendu Content Verification Program qui permet aux ayants droit de repérer et de retirer les vidéos qu'ils ne veulent pas voir partager. Cette dernière fonctionnalité permet à Google de se dédouaner définitivement de toute responsabilité concernant une utilisation illicite de ses services. Ce qui n'empêche pas quelques énervés (comme le conglomérat américain Viacom) de se lancer dans de longs procès qu'ils vont finalement perdre. Mais2007 et l'année suivante sont avant tout placées sous le signe d'une intense créativité. Les internautes s'approprient YouTube, qui devient le centre névralgique d'une contre-culture potache ultra-référencée à base de mèmes (phénomènes repris et déclinés en masse sur Internet), de détournements et de bêtes à poils. Des tas de bêtes à poils. Comme Nike Tn Requin ce couple de loutres qui nagent sur le dos en se tenant la patte dans la vidéo qui fait très vite le tour du monde, Otters Holding Hands. Ce n'est pas la première du genre, mais avec elle, en mars2007, le cute (mignon, en anglais) devient une des valeurs montantes du site de partage. Il atteindra sans doute son paroxysme l'année suivante, avec la consécration du chat Maru et de ses botes en carton. En avril2007, un jeune homme, Tay Zonday, caché en bas de la vidéo, se lève pour atteindre son micro et entonne de sa voix de basse Chocolate Rain, chanson de sa composition.A lafin de l'année, elle aura dépassé les70millions de vues. Au mois de mai, un gamin qui se fait mordre le doigt par son petit frère Charlie (cochez là aussi la case cute) et, dans le même temps, une blague anodine va devenir un phénomène. La bande-annonce nike air rift wholesale du jeu vidéo GTA IV vient de sortir, cependant les serveurs, surchargés, sont inaccessibles. Sur les forums du site communautaire4chan, un internaute poste un lien vers une version miroir qui fonctionne. Mais le lien en question atterrit sur la page YouTube de la chanson des années80 Never Gonna Give you Up de Rick Astley. Le Rickroll est né. Et a dure des mois, à se méfier de chaque lien croisé sur Internet. L'apothéose arrive un an plus tard, le1eravril2008, où toutes les vidéos de la page d'accueil de YouTube sont redirigées vers l'insupportable rengaine pop. Et comment ne pas citer (on s'arrêtera là, mais c'est loin d'être exhaustif) le Dramatic Chipmunk, posté en juin2007. La vidéo où l'on voit unrongeur qui se retourne sur une musique de climax cinématographique a dépassé aujourd'hui les 40millions de vues. Les Nike Requin vidéos virales s'enchanent et forgent l'image de cette création propre à Internet, loin des canaux institutionnels qui peinent à comprendre comment tout ceci fonctionne. Peut-être parce qu'il n'y a pas de recette, pas de méthode éprouvée pour générer un succès d'audience sur YouTube. Partage publicitaire Mais, petit à petit, la plateforme se professionnalise. L'image, d'abord, devient plus fine avec le passage en haute définition fin2008 (720 p, puis 1 080 p un an plus tard), ce qui ne manque pas de créer des tensions avec les fournisseurs d'accès à Internet qui voient le débit en provenance de YouTube gonfler à vue d'il. Google s'abrite derrière latrès précieuse neutralité des réseaux, principe fondamental d'Internet qui veut que toutes les données soient traitées sur un pied d'égalité, d'où qu'elles viennent et où qu'elles Nike Tn Pas Cher aillent. Une déclaration, en avril2009, va changer la face de YouTube. Google annonce la création, en compagnie des majors Universal Music et Sony Music, de Vevo, une plateforme dédiée à la diffusion de clips musicaux qui assure aussi la présence des artistes sur YouTube via des chanes spécialisées. Le lancement officiel arrive en décembre et, dès lors, la musique prend le pouvoir sur la plateforme. Deux mois plus tard, un jeune homme à peine pubère sort le clip de sa chanson Baby et grimpe les marches du classement de faon fulgurante. Justin Bieber, accompagné de Rihanna, Beyoncé et autres Miley Cyrus, va truster le haut du podium. La contre-culture web va se faire plus discrète, même si elle n'a pas dit son dernier mot, notamment, à cette époque, avec les Gregory Brothers, qui remixent les mèmes vidéo Double Rainbow et Bed Intruder. Très vite, YouTube devient le premier juke-box mondial, loin devant les services spécialisés de streaming. Pas difficile : toute la musique y est présente. Au-delà de Vevo, chaque artiste se doit en effet d'avoir ses clips sur la plateforme, en espérant gagner un peu d'argent grace au partage publicitaire. C'est ainsi qu'en juillet2012, un artiste coréen jusqu'alors inconnu dans le monde, Psy, publie sa dernière création : un morceau de k-pop déjantée intitulé Gangnam Style . Le succès est si fulgurant qu'il faudrait presque inventer un mot plus fort que le détestable buzz. Gangnam Style est la vidéo la plus vue du mois d'aot2012 et le monde entier se met à danser la chorégraphie du cheval. Le21décembre, elle devient la première vidéo à franchir le cap symbolique du milliard de lectures (et, le1erdécembre2014, elle a même cassé le compteur de YouTube, qui n'avait pas prévu d'aller au-delà de 2 147 483 647vues). L'offensive Facebook Malgré cette domination musicale etmême si, de l'époque pré-Vevo, seul Charlie le mangeur de doigts subsiste dans le top10, les créations des internautes n'ont pas disparu de la plateforme. Loin de là. Dès2010, en effet, une catégorie d'utilisateurs commence à prendre le pouvoir sur l'audience2.0 : les youtubeurs. En France, ils s'appellent Norman, Cyprien ou Hugo et, à l'international, PewDiePie ou Toby Turner. Le principe n'est pas nouveau (parler face caméra, jouer à des jeux vidéo en live, faire des blagues) mais il devient un format à part entière et gagne encore en popularité, propulsant de jeunes internautes créatifs au rang de célébrités incontournables. La chane du Suédois PewDiePie, qui teste chaque jour des jeux vidéo aussi barrés que lui, dépasse en aot2013 les 12millions d'abonnés et prend la tête du classement (qu'il conserve encore aujourd'hui avec 34,5millions d'abonnés). La domination de YouTube sur le marché de la vidéo en ligne a longtemps été incontestée. En octobre2011, selon Comscore, sur les 200milliards de vidéos lues dans le monde, près de44% l'étaient sur YouTube. Le deuxième du classement, le chinois Youku, dépassait à peine2%. A la quatrième place, avec1,3%, on trouvait un certain Facebook. Mais, en décembre2013, le réseau social aux 1,4milliard d'utilisateurs lance une offensive sans précédent sur ce terrain : les vidéos démarrent automatiquement quand on déroule son journal, que ce soit sur mobile ou sur ordinateur. Et l'impact est immédiat. A peine six mois plus tard, en aot, toujours selon Comscore, Facebook dépassait YouTube en nombre de vidéos vues aux Etats-Unis, avec 12,4milliards de vues (contre11,3milliards pour le service de Google). Même s'il est difficile de comparer une lecture imposée avec l'acte volontaire de regarder une vidéo YouTube, ce succès fulgurant fragilise à terme la position de leader de Google. Ce qui est capital dans un modèle économique basé sur la publicité. Les nouveaux concurrents D'où, peut-être, la diversification des revenus que tente d'opérer Google sur son service de vidéos. Si YouTube Movies, spécialisé dans la VOD (vidéo à la demande) et lancé en2011 avec Universal, Sony Pictures et Warner Bros, n'a pas vraiment convaincu (la mode est plutt aux services par abonnement de type Netflix), le géant espère beaucoup du lancement prochain de Music Key. L'objectif : rentabiliser sa situation de leader incontournable dans le domaine musical (chez les jeunes, notamment) en adoptant un modèle proche des services de streaming de type Spotify ou Deezer. Une nouvelle aventure qui n'a pas commencé sous les meilleurs auspices. Au printemps2014, Google a d faire face à la fronde des petits labels, un poil contrariés de se voir imposer le service sans pouvoir vraiment discuter des conditions. En gros, soit ils intégraient Music Key, soit ils abandonnaient toute rémunération liée à leurs vidéos sur YouTube. Un accord a finalement été trouvé en octobre. La plateforme a 10ans aujourd'hui. Cela peut sembler une éternité à l'échelle du Web (on peine presque à se souvenir d'un Internet sans l'omniprésence de la vidéo), mais c'est insuffisant pour considérer le géant comme indéboulonnable. YouTube a longtemps été synonyme de la vidéo sur Internet, entrant même dans le langage courant au même titre que Google pour la recherche. Mais de nouveaux acteurs émergent et gagnent très vite en popularité. Twitch, par exemple, racheté récemment par Amazon, spécialisé dans la diffusion en direct. Ce dernier se concentre pour l'instant sur son cur de cible, les gamers, mais lorgne de plus en plus du cté de la musique, avec l'arrivée prochaine d'une rubrique dédiée à la retransmission de session live. YouTube peut bien sr compter sur la puissance de Google pour maintenir dans les années qui viennent sa position de leader. Mais, sur Internet, les colosses dépendent tous d'un facteur particulièrement imprévisible : ces girouettes d'internautes.
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